France

Les réseaux économiques français à l’international en plein boom : comment les porter à leur plein potentiel ?

Les Français de l’étranger n’attendent plus les grandes réformes pour agir : ils s’organisent, innovent et tissent une multitude d'initiatives

Dans cet article Geoffroy BUNETEL, vice-président de CCI France International, dresse un panorama des réseaux économiques français et de leurs potentiels.

1. Une effervescence venue du terrain : la société civile française à l’étranger s’organise

Les Français de l’étranger n’attendent plus les grandes réformes nationales pour agir : ils s’organisent, innovent et tissent, sur le terrain, une multitude d’initiatives qui donnent naissance à un écosystème d’une richesse sans précédent.

Plus encore que par l’engagement électoral, c’est dans l’action concrète, associative, professionnelle et entrepreneuriale que s’affirme désormais leur mobilisation, et tout particulièrement sur le plan économique sur lequel nous concentrerons ici notre analyse.

Aux côtés des réseaux économiques historiques — les chambre de commerce et d’industrie françaises à l’international France fédérées par CCI France International, encore les Conseillers au Commerce Extérieur de la France— qui existent depuis la fin du XIXème siècle émerge une galaxie d’acteurs nouveaux, plus spécialisés, plus segmentés, plus granulaires :

  • Réseaux économiques privés : EFE International, French Founders, The Musettes, Le Bottin Mondial…
  • Réseaux sectoriels ou métiers : tech, finance, industries créatives, santé, mobilité durable, retail…
  • Réseaux d’alumnis, aujourd’hui présents dans plus de 100 pays, stimulés par l’internationalisation massive des écoles et universités françaises (HEC, ESCP, SKEMA, Centrale, Sciences Po…),
  • Communautés digitales, dont la simplicité d’accès et la faible barrière à l’entrée permettent la multiplication des groupes d’entraide et réseaux d’intérêt.

L’ensemble forme un écosystème dynamique, entrepreneurial et résolument bottom-up, qui reflète la grande diversité — sociologique, professionnelle, générationnelle — des Français établis hors de France.

2. Pourquoi une telle diversification ? Quatre moteurs structurants

Cette multiplication des réseaux ne relève pas du hasard ; elle reflète des transformations profondes de la communauté française à l’étranger.

(1) Le digital a révolutionné la sociabilité expatriée

Créer un groupe, animer une communauté, organiser un événement ou lever des fonds n’a jamais été aussi simple.

Les plateformes — LinkedIn, WhatsApp — réduisent considérablement les coûts d’organisation.

(2) La démographie et la sociologie des expatriés évoluent

La communauté française à l’international croît de 3 à 4 % par an, avec une part grandissante :

  • de jeunes professionnels,
  • d’entrepreneurs,
  • d’acteurs de la tech,
  • de talents créatifs,
  • d’indépendants et de freelances.

Ces publics cherchent des réseaux plus spécialisés que les structures généralistes historiques.

(3) La mondialisation change de nature

La fin de la “mondialisation heureuse”, le retour des risques géopolitiques et la complexification des mobilités créent un besoin accru de solidarité, de partage d’informations et de communautés de confiance.

(4) L’État est naturellement moins présent hors de France

Contrairement au territoire national, l’action publique française — par essence — ne peut pas être dominante à l’étranger.

Les Français hors de France ont donc appris à se prendre en main : à inventer leurs propres solutions, leurs propres réseaux, leurs propres institutions de fait.

Ce mouvement, très anglo-saxon dans l’esprit — une “Big Society” à la française — révèle des Français plus pragmatiques, plus entrepreneurs, moins dépendants de l’État que ce que l’on imagine parfois.

3. Un formidable atout… mais aussi de nouvelles questions

La richesse de cet écosystème est indéniable. Mais elle soulève une série de questions

➤ Comment éviter la concurrence inutile entre réseaux ?

Certaines initiatives se chevauchent : événements similaires, communautés doublonnées, sollicitations multiples des entreprises.

Comment prévenir la dispersion des énergies ?

Une fragmentation excessive peut réduire la visibilité de la communauté française dans son ensemble — et nuire à son influence économique.

Comment éviter un “millefeuille” de réseaux et le syndrome du village gaulois ?

L’abondance peut brouiller la compréhension pour les entreprises, les investisseurs ou les autorités locales.

Ces interrogations appellent un besoin nouveau : coordonner, cartographier, mettre en cohérence, sans brider la créativité du terrain.

4. Vers un “réseau des réseaux” : un rôle naturel pour CCI France Internationale ?

Face à cette effervescence, l’une des questions émergentes est de savoir qui pourrait jouer le rôle de plateforme, de fédérateur, non pour gouverner, mais pour connecter et mettre en synergie.

Plusieurs options existent:

  • L’Assemblée des Français de l’Étranger (AFE) ? Peu probable : son rôle institutionnel est consultatif, non opérationnel. Et puis, cette structuration des réseaux économiques privés venant de la société civile, ne serait-il pas contre-productif d’en placer la coordination sous une instance politique ?
  • Un acteur privé ? Possible, mais exige une légitimité collective que peu possèdent aujourd’hui.
  • Un consortium informel ? Intéressant, mais fragile dans la durée.

Dans ce paysage, CCI France International émerge comme un candidat naturel, par son histoire, son expertise, et sa présence institutionnalisée dans 98 pays.

Un réseau des réseaux, pour CCI FI, pourrait signifier :

Un changement de posture

Passer d’un réseau centré sur l’entreprise à une plateforme d’écosystèmes, où les chambres jouent le rôle de porte-avions accueillant à bord :

  • clubs sectoriels,
  • associations d’alumnis,
  • réseaux tech (French Tech San Diego),
  • partenaires institutionnels ou privés.

Une gouvernance ouverte

S’inscrire dans une logique de partenariats structurés : accords comme ceux déjà signés avec l’APM (Association pour le Progrès du Management) pour accélérer son internationalisation ou encore l’AEFE ou via la mise à disposition d’infrastructures pour des réseaux émergents.

Une culture d’alliance

Valoriser l’entraide, la bienveillance, la reconnaissance mutuelle des compétences et le partage d’événements ou de ressources.

L’initiative EFE International portée par le Comité National des Conseillers du Commerce Extérieur de la France et le réseau des CCI Françaises à l’International en donne un parfait exemple. EFE International cherche à mieux faire connaitre et valoriser les entreprises françaises de l’étranger et s’appuie sur 14 partenaires dont notamment l’UFE, Business France, l’Assemblée des Français de l’Etranger.

Une vision stratégique claire

Cartographier les réseaux existants, identifier les complémentarités, encourager les synergies, éviter les doublons.

En un mot : être un catalyste, un connecteur, un accélérateur sans jamais chercher à absorber ou uniformiser.

 

Geoffroy BUNETEL 

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